Euro Foot

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Juin 2021

Cette fiche est rédigée à l’attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet).

Les faits

Reporté l’été dernier à cause de la pandémie lié à la COVID-19, l’Euro de football aura lieu du 11 juin au 11 juillet. Du match d’ouverture à Saint-Pétersbourg à la finale à Londres, les 51 matches de ce tournoi se dérouleront dans 11 villes européennes et non dans un (ou plusieurs) pays organisateur(s) comme c’est généralement le cas pour cette compétition : l’UEFA (Union des associations européennes de football) a fait ce choix pour célébrer les 60 ans de l’Euro.

Depuis 1960, 8 des 15 éditions de ce tournoi qui se tient tous les 4 ans ont été remportées par trois pays (Allemagne, Espagne et France). Les 24 équipes nationales – dont celle de la Belgique – participantes à cet Euro 2020 (l’UEFA a officiellement conservé ce nom) ont décroché leur place pour la phase finale de la compétition suite à leurs résultats lors des matches éliminatoires auxquels 55 pays ont participé en 2019 et 2020. 

Malgré les restrictions sanitaires toujours de mise en Europe, les rencontres de l’Euro se tiendront en présence de spectateur·rice·s : l’UEFA a imposé que les stades soient remplis à 25 % (minimum) de leur capacité et ce, même si les protocoles en vigueur dans les différents pays ne l’autorisent pas. Bilbao et Dublin, refusant de se soumettre à la règle imposée par l’UEFA, ont été, in-extremis, retirées de la liste des villes hôtes de l’Euro. Dans les stades, comme autour des écrans géants qui seront, malgré la pandémie mais avec des restrictions, installés en Belgique et un peu partout en Europe, ces matches seront pour les supporter·rice·s l’occasion de montrer, de manière souvent exacerbée, leur attachement à leur équipe nationale. 

Au-delà de l’engouement qu’elles suscitent auprès des amateur·rice·s de football, l’Euro est un événement extrêmement lucratif : l’Euro 2016 a rapporté près d’1 milliard d’euros à l’UEFA. Épinglons d’autres chiffres mirobolants : les 34 millions d’euros promis à l’UEFA au gagnant du tournoi et les 1,5 million d’euros offerts à chaque équipe, par match gagné. Ou encore, les 330 000 euros qu’une marque devra débourser pour un écran publicitaire de 30 secondes sur la chaîne française M6 (diffuseur de l’événement), lors de la finale de l’Euro, si la France arrive à ce stade de la compétition.

Avec les Jeux olympiques et la Coupe du monde de football, l’Euro est l’événement sportif le plus médiatisé au monde. En 2016, en Belgique, la finale de cette compétition a attiré 2,5 millions de téléspectateur·rice·s, soit 70 % des personnes devant leur téléviseur à ce moment-là. Tandis que dans le monde, l’ensemble de cette compétition a attiré 6 milliards de téléspectateur·rice·s en audience cumulée. L’enquête « Génération 2020 » sur les pratiques numériques des jeunes en Fédération Wallonie-Bruxelles met également en lumière que parmi toutes les catégories d’information (musique, infos sensationnelles, société, etc.) c’est le sport qui suscite le plus d’intérêt ! (CSEM et Media-Animation, 2019)[1]

D’autres sports, mais aussi l’Euro de football féminin dont la prochaine édition aura lieu en 2022, doivent se contenter d’une visibilité bien moindre. Une grande première cependant et un symbole dans la lutte pour l’égalité entre hommes et femmes : lors de l’Euro, la française Stéphanie Frappart sera la première femme à arbitrer, en tant que 4e arbitre, un match de cette compétition masculine.

Anouck Thibaut

Le site de la RTBF, la chaîne qui diffusera les matches de l’Euro en Belgique francophone

Le site de l’UEFA avec des informations concernant l’histoire de la compétition, son organisation et les villes hôtes de l’événement.

Penser les faits

L’importance du « national »

L’équipe est « nationale », porte les couleurs de notre pays. Le dénominateur commun que nous mettons en avant, est la nationalité. N’est-ce pas une étrange chose, en fin de compte, que cette nationalité ? Les agriculteur·trice·s belges et français·es ne sont-ils pas plus proches l’un de l’autre, dans ce qui constitue leur vie quotidienne, que l’agriculteur·trice belge et le·la banquier·ère belge ? On célèbre l’appartenance à un pays. En quoi est-ce important d’appartenir à un pays ?

En quoi cela nous fait-il du bien de penser qu’on est belge (ou français, ou marocain, ou italien) ?

Comment font les personnes qui ont deux nationalités ? Supportent-elles pareillement leurs deux équipes nationales ? Se sentent-elles de leurs deux pays ?

Les nationalités sont-elles un obstacle à la fraternité humaine, à l’entente de tous les êtres humains ? Certain·e·s estiment qu’il faudrait supprimer toutes les frontières et l’idée même de pays. Qu’en pensez-vous  ?

Accorder de l’importance à la nationalité, cela peut signifier l’estime des personnes de même nationalité ; cela peut aussi signifier le rejet (voire la haine) des personnes qui ne partagent pas la même nationalité. Quelle différence y a-t-il entre ces deux postures ?

Une personne ayant des propos racistes peut tomber dans les bras d’une personne racisée pour célébrer un but. Pourquoi ce plaisir de ne former qu’une seule grande famille ne dure-t-il pas une fois les lampions éteints ?

Effet de groupe et liberté

Certaines personnes qui ne s’intéressent jamais au football commencent à regarder des matches à la télévision et à hurler quand les Diables marquent un but. En cas d’élimination, certain·e·s pleurent réellement, sincèrement, comme si un être cher venait de disparaître. Beaucoup font, pendant une phase finale de coupe du monde ou d’Euro des choses qu’ils et elles ne feraient pas en temps ordinaire.

Dans quelle mesure cette effervescence collective qui a pour effet que certain·e·s « ne sont plus eux-mêmes », s’impose-t-elle à nous ? Dans quelle mesure peut-on dire qu’on est libre si des événements conditionnent à ce point nos comportements ?

À moins que, au contraire, cette circonstance très spéciale, en nous permettant – à la façon des carnavals – de ne plus respecter les conventions, nous libère ?

L’exaltation populaire et collective aliène-t-elle ou libère-t-elle ?

Se mesurer aux autres

Athlétisme, cyclisme, football, boxe, gymnastique, natation, etc. Les sports distinguent les vainqueur·e·s et les vaincu·e·s, établissent des classements, dressent des hiérarchies. En quoi est-il important d’ordonner les personnes les un·e·s par rapport aux autres ? Est-il important de « valoir plus » que les autres ? En quoi la valeur de quelqu’un dépend-elle de son classement ?

Qu’est-ce que le mérite ? Celui-ci se mesure-t-il à sa place dans le classement ?

Ne retrouve-t-on pas une situation similaire en milieu scolaire ? Qu’est-ce qui importe, à l’école, pour un·e élève ? Est-ce apprendre des choses intéressantes ? Est-ce obtenir le plus de point qu’il ou elle est capable d’obtenir, compte tenu de ses forces et faiblesses personnelles ? Est-ce obtenir plus de points que les autres ? Est-ce d’être le meilleur ou la meilleure ?

Pourquoi en irait-il autrement dans le sport ?

Football féminin

En 2022 aura lieu l’Euro de football féminin. L’équipe nationale belge (on appelle ses joueuses les « Red Flames ») est qualifiée pour y prendre part. Les élèves peuvent probablement retrouver les noms de tous les Diables rouges qualifiés pour l’Euro 2020. Combien de joueuses des Red Flames pourront-ils citer ? Qui connait réellement l’histoire du foot féminin qui a commencé en même temps que les hommes, qui a été encouragé pendant la première guerre mondiale et puis interdit plus ou moins jusque dans les années 70’s ?

Pourquoi l’engouement est-il différent pour les hommes et pour les femmes ? Pourquoi la « magie » n’opère-t-elle pas pareillement ? Les femmes ont-elles moins de mérite ? Pourquoi est-ce moins populaire ? Éprouvons-nous des difficultés à voir des femmes s’adonner à un sport qui est souvent décrit par des termes militaires (attaquants, défenseurs, aller au combat, agressivité, etc.) ? Pourquoi ?

Le saviez-vous ? Les rémunérations de l’équipe championne du monde sont 10 fois moins importantes chez les femmes (4 millions d’euros en 2019 contre 40 millions pour leurs homologues masculins). C’est l’un des sports où l’écart est le plus grand. C’est aussi l’un des sports les plus visibles. Les sponsors publicitaires rétribuent moins les sportives que les sportifs.  Qu’en pensez-vous?

Éthique et sport

L’histoire du football est riche en moments de grand fair-play[2]. Elle est hélas émaillée d’épisodes où le fair-play a été très sérieusement égratigné. Le but de la main de Diego Maradona en quart de finale de la Coupe du monde 1986, contre l’Angleterre en est le plus célèbre. L’assistance vidéo offerte à l’arbitrage rend ces situations plus rares, mais il continue d’y avoir des joueurs qui s’attaquent aux chevilles fragiles des adversaires les plus talentueux.

Qu’en pensez-vous ? Que feriez-vous si vous étiez confrontés à de pareilles situations ? Comment décririez-vous l’envie de gagner ? Gagner un match de football justifie-t-il de blesser quelqu’un sciemment ? Qu’est-ce qui prévaudrait à vos yeux : la victoire (avec, éventuellement, une qualification et des gains financiers substantiels) ou l’honnêteté ? Le fair-play est-il encore une valeur cardinale dans le sport ? Qu’en est-il dans le sport de haut niveau ? Et dans la pratique quotidienne (ou hebdomadaire) des élèves ?

Quel est le prix d’une tache sur la conscience ?

Le saviez-vous ? Recourir à des moyens illicites ou non éthiques pour obtenir un résultat que l’on veut obtenir à tout prix est une question qui dépasse le monde du sport. C’est, notamment, le thème de l’histoire de Faust.

Médias et sport

La presse et les journaux sociaux seront inondés de football. Une part considérable de l’espace disponible sera occupée par des informations à l’intérêt objectivement limité. Découvrir l’ambiance dans cinq grandes places du pays où auront été disposés des écrans géants, entendre  un enfant dire qu’il ou elle « aime bien Eden Hazard » présente un intérêt limité en termes d’information nous permettant d’appréhender, connaître et comprendre le monde.

Pourtant, le monde ne s’arrête pas de tourner et des choses importantes se passeront ailleurs. Des migrant·e·s périront en Méditerranée, des personnes Ouïghours et des personnes Rohingyas seront victimes de traitements inhumains, les gouvernements prendront des mesures dans de multiples domaines, des scientifiques feront des découvertes importantes, etc.

Si vous étiez responsable d’un journal, à quoi consacreriez-vous vos pages ou votre temps d’antenne ? Quels critères mobiliseriez-vous pour définir ce dont il est important de parler ? Un journal doit-il aborder les sujets populaires ou bien a-t-il le devoir de porter à la connaissance du public des sujets qui sont plus complexes ?

 

[1] Voir l’enquête de Génération 2020 

[2] Voir par exemple : Top 10 des gestes les plus fair-play vus sur les terrains de foot

Des ressources et des outils pédagogiques pour aller plus loin
Éducation aux médias à travers le sport et l’Olympisme
MARS – Media & Anti-Racisme dans le Sport
What the Foot ?

 

Augmentation du coût de l’énergie

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Fusillade dans une école au Texas

Fusillade dans une école au Texas

Mai 2022 Cette fiche est rédigée à l'attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet)....

Le conflit russo-ukrainien

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Le conflit russo-ukrainien Cette fiche est rédigée à l'attention des tou·te·s les enseignant·es et éducateur·rices de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou...

Chaos au capitole

Janvier 2021

Cette fiche est rédigée à l’attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet).

Les faits

Donald Trump (Républicain) avait remporté les élections du 8 novembre 2016 sur Hillary Clinton (Démocrate) au nombre de grands électeurs.

Tout son mandat a été émaillé de moments « atypiques » pour un Président des Etats-Unis. Et par une utilisation frénétique des réseaux sociaux, où il ne manquait pas d’évoquer des « vérités alternatives ».

La 59e élection présidentielle américaine a lieu le 3 novembre 2020. L’élection a connu un taux de participation exceptionnel. Joe Biden (démocrate) a obtenu plus de 51% des voix et Donald Trump 46%. Les Grands électeurs se sont répartis entre 306 pour Biden et 232 pour Trump.

Mais bien avant le scrutin, Donald a annoncé sa conviction que ces élections seraient gravement entachées d’irrégularités à son détriment. Le soir du vote, il a refusé de reconnaître sa défaite, évoquant des « fraudes massives » et « une élection volée », entamant de nombreux recours en la justice. Tous ses recours ont été autant d’échecs, ce qui ne l’a pas empêché de maintenir ses accusations.

Mercredi 6 janvier, le Congrès américain devait certifier la victoire de Joe Biden, simple formalité protocolaire d’ordinaire. Donald Trump ne désespérait pas de faire annuler la victoire du démocrate par le vice-président Mike Pence, qui préside la séance. Il avait aussi appelé ses partisan·ne·s à manifester à Washington et prévu de s’adresser à elles/eux avant cette cérémonie. Il a encore martelé : « nous avons remporté cette élection, et nous l’avons remportée largement » et a galvanisé ses partisan·ne·s en leur demandant de se diriger vers le Capitole pour exprimer leur colère.

S’en est suivie une prise d’assaut par ses partisans du Capitole, symbole de la démocratie américaine. Bilan : quatre morts, bureaux saccagés et séance interrompue. Elle reprendra dans la nuit, un climat de consternation s’installant dans le monde, alors que par ailleurs, les démocrates remportaient deux sièges de sénateurs en Georgie et par là la majorité au Sénat.

« Restez pacifiques », avait-il plaidé sur Twitter, au plus fort de l’invasion, avant que son compte et celui de Facebook ne soient suspendus.

Trump admettait le lendemain la fin de son mandat et promettait une «transition ordonnée », dans un communiqué transmis à la presse répétant qu’il ne reconnaissait pas les résultats de l’élection présidentielle.

Après la journée de chaos ce mercredi 6 janvier, Donald Trump, accusé d’avoir « allumé la mèche », peut-il rester président des États-Unis treize jours de plus ? C’est la question, alors que certains évoquent le 25e amendement autorisant le vice-président et une majorité du cabinet à déclarer le président « inapte » à exercer ses fonctions.

Bernard Chateau

Penser les faits : quelques pistes

Activisme

L’activisme désigne un engagement politique qui vise l’action directe, pour faire entendre le mécontentement ou les demandes d’un groupe de personnes.

Les manifestant·e·s qui ont envahi le Capitole sont révolté·e·s contre une situation (exacte ou pas exacte, mais ils y croient) qui les indigne. Ils/elles ont manifesté dans la rue, se sont rendu·e·s devant le Capitole, ont voulu empêcher la tenue de la réunion en cours, ont affronté les forces de l’ordre qui voulaient le leur interdire, les ont débordées et sont allé·e·s mettre la pagaille dans les bureaux.

Qu’est-ce qui dérange et ne dérange pas, parmi les éléments suivants [1]?
a. Des personnes ne croient pas les résultats officiels des élections.
b. Des personnes en colère veulent agir pour changer la situation qui les met en colère.
c. Des personnes manifestent dans la rue pour dire qu’elles ne sont pas d’accord, donnent leur avis alors qu’on ne le leur demande pas.
d. Des personnes veulent empêcher une réunion des parlementaires, veulent empêcher le fonctionnement de la démocratie.
e. Des personnes n’obéissent pas aux forces de l’ordre.
f. Des personnes mettent à sac un bâtiment, cassent des choses, mettent le désordre dans les affaires des gens qui y travaillent.
g. Le bâtiment que les personnes mettent à sac est le Parlement (si on mettait à sac les bureaux d’une entreprise privée, ce serait moins grave) ?

Désobéir

Les actions de protestation, même pacifiques, peuvent être illégales. Exprimer sa colère et son opinion permet-il tous les comportements ? Permet-il notamment de ne pas respecter la loi ? Par exemple, rater les cours pour aller manifester pour une justice climatique ou envahir le capitole pour suspendre la confirmation de l’élection d’un nouveau président.

Imaginons un instant que, comme le pensent les partisan·ne·s de Donald Trump (mais aucune preuve matérielle sérieuse ne le confirme), il y ait vraiment eu de la fraude pendant les élections et qu’existe vraiment un complot pour faire gagner injustement Joe Biden. Sous cette hypothèse, ces gens auraient-il raison de faire tout ce qu’ils peuvent empêcher l’élection de Joe Biden ?

La plupart des révolutions, des changements de régimes se sont déroulés de manière violente, notamment pour sortir de dictatures. Pourquoi traite-t-on leurs auteur·e·s de héros et condamne-t-on les partisans de Donald Trump qui ont le sentiment d’agir pareillement ?

La désobéissance civile [2]
Dans « La désobéissance civile » (1849), Henry David Thoreau défend l’idée que le citoyen qui ne s’oppose pas à une politique injuste menée par son pays en devient le complice. C’est la raison pour laquelle il avait, 3 ans plus tôt, refusé de payer un impôt en signe d’opposition à l’esclavage et à la guerre contre le Mexique. Cela lui avait valu un séjour en prison. Cette idée de désobéissance civile a inspiré des personnes telles que Gandhi, Martin Luther King et Nelson Mandela. « Pour être qualifié de désobéissance civile, le non-respect d’une norme doit être non-violent. Son auteur doit rechercher en l’accomplissant publiquement, la satisfaction de l’intérêt général. »[3] D’aucun·e·s établissent 7 critères permettant d’assimiler une action à de la désobéissance civile. Elle doit (i) être collective, (ii) être publique, (iii) être illégale (ou extra-légale), (iv) être non-violente, (v) intervenir en plus d’une action en justice, (vi) être constructive, proposer des alternatives et (vii) que ses participant·e·s acceptent les risques de sanction.

Réseaux sociaux et traitement des informations

Les réseaux sociaux sont devenus un moyen privilégié de communiquer directement avec le public, sans dépendre des rédactions de presse et de l’intermédiaire d’un·e journaliste. Depuis le début de son mandat, Trump les utilise abondamment pour y diffuser « sa » vérité ou «  vérités alternatives » mêlant informations approximatives voire fausses, propos calomnieux.

Ce 6 janvier, Twitter, Facebook, Instagram et Snapchat ont décidé de bloquer les comptes du Président des États-Unis.
Les responsables de ces réseaux peuvent-ils/elles décider seul·e·s de censurer l’un·e ou l’autre ? Quelles règles estimeriez-vous nécessaire qu’un réseau social applique avant de prendre ce type de décision ? Et si, un jour, les dirigeant·e·s des plate-formes étaient extrémistes et censuraient des paroles « démocratiques » ? Que se passerait-il ?

Quelle différence faire entre une sanction décidée par une personne privée et celle d’un juge, établie au terme d’un procès qui respecte des règles d’équitabilité (juger de façon indépendante et impartiale après avoir écouté tous les points de vue et au vu des lois) ?

Le mensonge court toujours plus vite que la vérité. Sur le web, les fausses informations se répandent six fois plus rapidement que les vraies. Quand une fausse information est diffusée, le démenti qui suit sera toujours moins partagé que la fausse nouvelle elle-même. Comment faire ? Reconnaissez-vous facilement une fausse information ? Comment réagissez-vous quand vous recevez une fausse information ?

Violence de l’État

Voici un peu plus de cent ans, Max Weber a, le premier, mis en avant l’idée selon laquelle la police est l’une des institutions dépositaires du monopole de la violence physique légitime. En dehors de cas particuliers tels que la légitime défense, un·e citoyen·ne ne peut faire usage de la violence physique.

Les États-Unis se sont construits sur l’idée qu’il fallait circonscrire les pouvoirs de l’État. La Constitution américaine de 1776, qui a inspiré, en France la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et puis, en 1948, la Déclaration universelle des droits de l’homme, repose sur l’idée qu’il faut défendre les citoyen·ne·s contre l’arbitraire de l’État. On les protège ainsi contre les immixtions dans leur vie privée, contre les arrestations arbitraires, contre les confiscations, contre les procès inéquitables, etc. Le droit de porter une arme s’explique, aux États-Unis, par la nécessité de doter les citoyen·ne·s des moyens de combattre l’État si celui-ci devait enfreindre ces principes.

Selon vous, la violence doit-elle être le monopole de l’État ? Jusqu’où la police peut-elle aller dans l’usage de la violence ? Existe-t-il des circonstances où vous estimez que des citoyen·ne·s auraient le droit d’utiliser la violence par le biais, notamment d’une arme à feu ? Qui juge que ces circonstances sont rencontrées ?

Violence et discrimination

Aux États-Unis, les forces de police de tout le pays ont commis des violations graves et généralisées des droits humains au cours de manifestations majoritairement pacifiques contre le racisme systémique et les violences policières (voir à ce sujet l’article d’Amnesty International). Or, le dispositif policier était très faible lors de la prise d’assaut du Capitole, alors que le risque était connu. D’aucun·e·s critiquent ce manque d’anticipation et « l’indulgence » des autorités, en comparaison, par exemple, à la manifestation Black Lives Matters pour laquelle le déploiement des forces de l’ordre était considérable.

Peut-il y avoir « deux poids, deux mesures » dans l’usage de la force par l’État ? Y a-t-il des situations, selon vous, qui justifient un certain laxisme des forces de l’ordre et d’autres qui nécessiteraient plus de fermeté ? Pour quelles raisons ? Comprenez-vous que certain·e·s, indigné·e·s, soient tenté·e·s par la violence pour faire changer les choses ?

Le vote

Le vote sert à élire nos représentant·e·s qui voteront des lois et désigneront un gouvernement. C’est le régime politique qui existe en Belgique. Un·e parlementaire représente la population. Il ou elle ne peut donc pas, dans son mandat, ne défendre que son intérêt personnel. Pensez-vous qu’il soit possible que quelqu’un arrive à « s’oublier » au profit de l’intérêt général ?

Certaines personnes plaident pour que, en plus (ou à la place) des parlementaires élu·e·s, un certain nombre de représentant·e·s soient désignés par tirage au sort. Que pensez-vous de ce système ? Aimeriez-vous être ainsi tiré·e au sort pour représenter toute la population belge ?

Que l’on soit élu·e ou tiré·e au sort, représenter la population belge implique de la connaître. Or, la « population belge », cela recouvre de très très nombreuses situations, conditions de vie, opinions, besoins, attentes, etc. différents. Comment vous y prendriez-vous pour appréhender et concilier cette diversité ?

La puissance des États-Unis

Les images du Capitole ont fait le tour du monde. Pourtant, il n’est pas rare que de tels événements se déroulent un peu partout sur la planète. Pourquoi, selon vous, ceux-ci nous touchent et font la une partout dans le monde ? À d’autres endroits de la planète, de manière très fréquente, les principes démocratiques ne sont pas respectés.

Pourquoi ces images choquent-elles particulièrement quand elles se passent aux États-Unis ?
Pourquoi les médias les relaient-ils tant ? Pourquoi les gens en parlent-il plus dans la rue, sur les réseaux sociaux, etc. ?

Références

1 Note pour les enseignant·e·s. Ces éléments permettent de décomposer un fait global et complexe en composantes plus fines, permettant de circonscrire le périmètre du débat et de mieux faire apparaître les différents enjeux.
2 La ligue de l’éducation et de l’éducation permanente a produit un dossier sur la désobéissance civile.
3 https://www.jurisdoctoria.net/2017/03/la-reconnaissance-de-la-desobeissance-civile-en-democratie/

Ressources

  • Déjouer les pièges de la désinformation : http://csem.be/reperesfakenews

  • Comment les algorithmes influencent notre usage d’Internet:  http ://csem.be/reperesbigdata

  • Les journalistes en classe face à la désinformation : http://www.csem.be/journalistesenclassefacealadesinformation

Vivre ensemble dans un monde médiatisé/ les réseaux sociaux : http://csem.be/sites/default/files/files/lesreseauxsociaux.pdf

Réagir face à des fausses nouvelles : 

  • A l’école des réseaux sociaux » https://schoolofsocialnetworks.org/fr/pensee-critique-et-confiance-enseignants/
  • « nous sommes tous des diffuseurs » https://habilomedias.ca/ressources-p%C3%A9dagogiques/au-del%C3%A0-des-faits%C2%A0-nous-sommes-tous-des-diffuseurs

 

 

Augmentation du coût de l’énergie

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Fusillade dans une école au Texas

Fusillade dans une école au Texas

Mai 2022 Cette fiche est rédigée à l'attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet)....

Le conflit russo-ukrainien

Le conflit russo-ukrainien

Le conflit russo-ukrainien Cette fiche est rédigée à l'attention des tou·te·s les enseignant·es et éducateur·rices de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou...

Un professeur assassiné

Un professeur français assassiné pour avoir montré des caricatures de Mahomet 

Octobre 2020

Cette fiche est rédigée à l’attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet).

 

Les faits

Ce vendredi 16 octobre, Samuel Paty un professeur d’histoire-géographie d’un collège de Conflans-Sainte-Honorine, en France, a été retrouvé mutilé à proximité du collège. L’enseignant, âgé de 47 ans, avait montré à ses élèves une caricature de Mahomet une semaine auparavant, sur laquelle le prophète apparaissait accroupi avec une étoile dessinée sur les fesses et l’inscription « une étoile est née ». Le professeur aurait invité les élèves de confession musulmane à sortir de la classe avant de montrer ce dessin, afin de ne pas les choquer, selon un parent d’élève interrogé par la radio France Inter.

Si les circonstances exactes de l’agression ne sont pas encore connues, celle-ci semble avoir été commise par un citoyen russe né à Moscou en 2002 et d’origine tchétchène. Âgé de 18 ans, le meurtrier présumé était né à Moscou de parents tchétchènes, selon des sources policières citées par l’Agence France presse. Il vivait avec sa famille à Evreux, à près d’une centaine de kilomètres du lieu de l’attaque. Il ne fréquentait pas l’établissement du Bois-d’Aulne. Il était connu des services de sécurité pour des faits de droit commun mais il n’avait pas de casier judiciaire et n’était pas fiché S pour radicalisation. La police a tenté d’interpeller l’auteur présumé des faits le 16 octobre vers 17 h, mais celui-ci aurait fait feu sur les agents avec un pistolet d’airsoft (une arme factice tirant des billes en plastique) en criant « Allah Akbar ».

Les policiers ont tiré à dix reprises et ont abattu l’assaillant. Celui-ci avait posté sur Twitter une photo de la tête coupée de sa victime, associée à un message adressé au président français Emmanuel Macron, « le dirigeant des infidèles ».Neuf personnes ont été mises en garde à vue ce 17 octobre. Parmi elles, les parents, un grand-parent et le frère cadet de l’assaillant. Un parent d’élève ayant appelé à l’éviction de l’enseignant sur Facebook a aussi été interpellé. Deux de ces personnes se sont présentées spontanément à la police. Qualifié par Emmanuel Macron d’« attentat terroriste islamiste caractérisé », ce meurtre a suscité une vive émotion à travers le pays. Le ministre français de l’Éducation a jugé que le professeur était « tout à fait en droit » de montrer en classe des caricatures de Mahomet et que la vidéo de protestation d’un parent d’élève diffusée suite à cela était « totalement scandaleuse et faite pour aboutir à quelque chose de probablement violent ». L’Élysée annonce qu’un hommage national sera rendu au professeur mercredi.

Matthias Bertrand
Écrit le 17/10/2020 à 17 h. Voir le fil info de la RTBF

Ces fiches sont un outil pédagogique destiné à développer la réflexion critique et autonome des élèves. Des références à des idées très différentes peuvent être communiquées afin de susciter cet esprit critique. Les idées présentées dans ces fiches ne reflètent pas forcément les positions d’Annoncer la Couleur – Enabel, d’Amnesty International Belgique francophone, du CSEM ou de la RTBF.

Penser les faits : quelques pistes

Cette actualité ouvre plusieurs portes sur des questions de fond de notre société. Il est difficile de prévoir celles dont les réflexions spontanées des élèves favoriseront l’exploitation… L’enseignant·e peut se sentir plus à l’aise d’en développer une plutôt qu’une autre. Les événements sont un substrat pour aborder des questions qui les dépassent. Le projet n’est pas de juger les personnes impliquées dans cette affaire.

Faire justice

Samuel Paty a été tué par un homme qui avait décidé que ce qu’il avait fait était suffisamment grave pour mériter ce châtiment. Pourquoi est-il interdit de se faire justice soi-même ? Quelle différence fait-on entre vengeance et justice ? Quelle différence entre état de droit et loi de la jungle ? Quels risques une société court-elle si chacun·e se donne le droit de juger les gens et d’imposer la peine décidée ?

Dans l’histoire, la loi naturelle a d’abord prévalu. Si A vole une poule à B qui s’en rend compte, et que B est plus fort que A, il peut le passer à tabac et lui prendre tout ce qu’il possède. Puis est arrivée la loi du talion. Pas question que B ne fasse plus de mal à A que ce qu’il a personnellement subi. Et puis, les mentalités ont continué d’évoluer et, au 18e siècle est apparue la Justice moderne, impartiale et indépendante qui confie à des magistrat·e·s le soin de conduire des procès équitables.
En perdant le droit de se faire justice soi-même, l’être humain perd une part de sa liberté. De même, le code de la route fait perdre la liberté de rouler à gauche.

Les lois de la société font parfois perdre en liberté. Certains, comme Jean-Jacques Rousseau soulignent que cette perte de liberté permet toutefois d’élargir le champ des possibles offert aux êtres humains. Le code de la route réduit notre liberté, mais, en organisant la sécurité de nos déplacements, nous permet de circuler et augmente ainsi notre liberté. Êtes-vous d’accord avec cela ? En quoi l’interdiction de se faire justice soi-même serait-elle bénéfique à l’être humain ?

« Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »
Article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme

La peine de mort

Tout assassinat est, a priori, choquant. Pourquoi la vie humaine est-elle considérablement protégée dans nos sociétés ? Samuel Paty a été condamné à mort par son meurtrier. Existe-t-il des crimes suffisamment graves pour justifier qu’on tue quelqu’un ? La haine que l’on ressent à l’égard de quelqu’un peut-elle justifier que l’on souhaite sa mort ? Et que l’on passe à l’acte ? Quelle différence y a-t-il si c’est un État qui condamne à la peine capitale et exécute les condamné·e·s ? Une société peut-elle avoir des projets plus importants que la vie, l’épanouissement et l’accomplissement des êtres humains ? L’humanité a-t-elle plus important à faire que d’atteindre ses Objectifs du développement durable qui traduisent l’aspiration aux droits humains ? Si oui, qu’est-ce qui pourrait importer davantage ?
Plus pour nourrir la réflexion sur la peine de mort.

L’auteur, un monstre ?

D’aucun·e·s recourent au terme « monstre » pour qualifier des personnes qui mériteraient, à leur estime, la peine capitale. Jack l’éventreur ? Un monstre. Geneviève Lhermitte ? Un monstre. Marc Dutroux ? Un monstre.
Un monstre, c’est d’abord une créature légendaire, mythique, remarquable par la terreur qu’elle inspire. Une bête, un animal. Antispécistes mis·es à part, personne ne voit de problème d’ordre éthique à tuer un monstre. Il ne s’agit plus de peine de mort, mais de mesure de protection de la société, au même titre que l’on abattrait un animal dangereux qui se serait enfui d’un zoo ou d’une réserve naturelle.

Que se cache-t-il derrière cette inclination à qualifier de monstres les auteur·e·s des actes les plus abominables ? N’est-ce pas une façon de les exclure du genre humain pour les mettre à distance et, ainsi, refuser de considérer le cousinage qui nous unit à elles et eux ? Si nous décidions de croire que Marc Dutroux est un monstre, qu’il diffère définitivement de nous, cela nous exonérerait de réfléchir à la part sombre qui réside en nous et à l’assumer. Pourtant, les expériences de Milgram — et tant d’autres après lui — ont démontré que nous sommes des êtres fragiles, manipulables, capables du pire si nous sommes mis dans les conditions nécessaires pour cela. Se distinguer radicalement d’un assassin en le qualifiant de « monstre » n’est-il pas une façon de jeter le voile sur les zones d’ombre de notre condition ?

Dans « L’aube »[1], Elie Wiesel fait penser au personnage central de son histoire, que « la haine – comme la guerre et l’amour et la foi – justifie tout, explique tout ». Êtes-vous d’accord en ce qui concerne le verbe « expliquer » ? Êtes-vous d’accord en ce qui concerne le verbe « justifier » ? Seriez-vous d’accord d’ajouter le verbe « excuser » ?

L’enseignement

L’agression de Samuel Paty est liée à l’exercice de son métier d’enseignant. Il a voulu expliquer aux élèves des questions relatives aux droits humains et, singulièrement, à la liberté d’expression. C’est un des rôles explicitement dévolus à l’école que de «préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d’une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures »[2]. Cela, c’est la loi. La respecter n’interdit pas de la discuter.
Que pensez-vous de ce décret ? La transmission de valeurs devrait-elle être le monopole de la famille ? L’école doit-elle défendre certaines valeurs ? Si cela relève de sa mission, comment définir les valeurs que l’école doit défendre ? Que faire si un·e élève n’est pas d’accord avec une ou plusieurs valeurs qui sont défendues par l’école ?

Lorsque qu’un·e enseignant-e choisit de traiter d’un sujet chargé en émotion et/ou qui peut faire écho au vécu d’un·e élève ou de ses proches (ex : Shoah, passé colonial, cancer du sein, etc.), devrait-il ou elle lui imposer de participer au cours, lui proposer de quitter la classe ou s’arranger pour exclure de son cours tout ce qui pourrait offenser ses élèves ?
La réponse est-elle la même pour tous les types d’« offenses » ? Peut-on à la fois dire que toute parole doit pouvoir être dite (dans un cours sur la liberté d’expression) et prendre des précautions pour que l’une d’elles ne soit pas entendue ?
Peut-on accepter qu’un·e élève refuse d’assister à des cours parce que le message qui y est porté contreviendrait à ses convictions ? Sur quels sujets l’école peut-elle décider que « c’est comme ça, tu n’as pas le choix ! » ou que « tu te fais librement ta propre idée, c’est toi qui vois » ? Trouvez-vous que l’école formate vos cerveaux, oriente trop votre pensée ou que, au contraire, elle vous donne les moyens de développer votre propre opinion sur un sujet en vous faisant découvrir plusieurs points de vue ?

Voir ici le décret « Missions » du 24 juillet 1997, en particulier les articles 6 et 8. À noter que l’article 8, 5° dispose qu’il faut veiller à ce que chaque établissement « fasse respecter par chaque élève l’obligation de participer à toutes les activités liées à la certification organisée par l’établissement, et d’accomplir les tâches qui en découlent ».

La liberté d’expression

De tout temps, la caricature est un média qui a provoqué, gêné, suscité des débats. La caricature est en effet une « représentation grotesque obtenue par l’exagération et la déformation des traits caractéristiques du visage ou des proportions du corps, dans une intention satirique » (Larousse)[3]. Dans le cadre scolaire, l’analyse d’un média permet d’aiguiser son esprit critique. Elle contribue à l’exercice de la citoyenneté puisqu’elle nous invite à décoder un message dans un monde hyper-médiatisé et à en comprendre les intentions.

Dans un état démocratique, la liberté d’expression est très vaste et elle vaut aussi pour des idées qui « heurtent, choquent l’État ou une fraction quelconque de la population »[4]. Mais elle n’est pas absolue. Certains propos sont considérés comme équivalant à des actes. La liberté d’expression s’arrête donc à tout propos qui incite, pousse, appelle d’autres personnes à la haine[5].

La liberté d’expression n’est pas le cœur de cette affaire, Samuel Paty n’ayant pas formulé une opinion, mais donné cours. Il se peut toutefois que les élèves s’y arrêtent car c’est un sujet sensible. La liberté d’expression est limitée par la loi, notamment par l’interdiction de l’incitation à la haine. Qu’en pensez-vous ? Quelle différence existe-t-il entre une caricature et un propos diffamatoire ? Certain·e·s pensent que l’offense religieuse devrait limiter la liberté d’expression. Leur position n’est pas celle de la loi. Qu’en pensez-vous ?

Peut-on tout dire ? Socrate, dans l’histoire des trois filtres[6], tend à réduire la liberté d’expression, êtes-vous d’accord avec lui ? La liberté d’expression est très développée, notamment sur les réseaux sociaux qui sont très peu contrôlés. Pensez-vous que c’est une bonne chose ?

Des outils pour nourrir la réflexion sur la liberté d’expression :
Dossier pédagogique et cahier d’exercices – la liberté d’expression (Amnesty International)
Cultures occidentales et liberté d’expression (CSEM)

 

[1] WIESEL Elie, 1960, L’aube, Seuil, coll. Points, p. 93.
[2] Décret « Missions », article 6.
[3] http://csem.be/sites/default/files/files/regardshistoriquessurlacaricature.pdf
[4] Cour européenne des droits de l’homme, arrêté Handyside (7 décembre 1976)
[5] http://csem.be/repereslibertedexpression
[6] On prête à Socrate (voir histoire complète ici) d’avoir établi qu’une chose ne pouvait être dite que si elle est à la fois exacte, bonne et utile.

 

 

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Le conflit russo-ukrainien

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Pandémie de coronavirus

Pandémie de coronavirus

COVID-19

Mai 2020

Cette fiche est rédigée à l’attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet).

Les faits

La pandémie de maladie à coronavirus de 2019-2020 a débuté en novembre/décembre 2019 dans la ville de Wuhan, en Chine centrale, puis s’est propagée dans le monde entier.

Une des caractéristiques de cette épidémie (déclarée « pandémie » le 11 mars par l’Organisation mondiale de la santé) est son haut degré de contagiosité. La survie du virus sur certaines surfaces, son mode de propagation, notamment par les gouttelettes d’eau émises lors d’éternuements, de postillons voire au moment d’expirer l’air de ses poumons et l’existence de porteurs asymptomatiques ont eu pour effet que les autorités de nombreux pays ont pris de très sévères mesures de confinement.

Celles-ci ont eu pour effet d’atténuer la propagation de la maladie et d’atténuer la sollicitation des services de santé. La majorité des personnes atteintes développent une forme de la maladie proche de la grippe qu’on peut soigner au moyen d‘anti-douleurs et en respectant un confinement strict pour éviter la transmission notamment à des proches. Dans certains cas, la victime éprouve d’importantes difficultés respiratoires qui nécessitent une hospitalisation. Les niveaux ultérieurs sont le besoin d’une assistance respiratoire, les soins intensifs et, dans certains cas, le décès.

La probabilité d’être durement atteint·e n’est pas très élevée, mais le nombre de cas est tel que les chiffres relatifs aux décès sont élevés.

Le confinement strict a été imposé en Belgique jusqu’au vendredi 15 mai, les écoles ouvrant à nouveau mais très partiellement leurs portes le lundi 18 mai.  Sur toute la période*, on a enregistré en Belgique plus de 8500  personnes qui ont perdu la vie en raison du COVID-19.

*en date du 11 mai 2020

Penser les faits : quelques pistes

 

Nos conditions de vie

La pandémie de coronavirus a fait 3 700 morts. Cela a causé une émotion considérable et mis le pays sens dessus dessous. Pourtant, en 2017 et 2018 on a compté environ 7 400 personnes tuées en Belgique des suites d’accidents de la route. Quelle est la différence ? Pourquoi acceptons-nous, dans un cas, de changer radicalement notre mode de vie et ne l’acceptons-nous pas dans l’autre ?

On peut aller plus loin sur l’introspection de notre attachement à notre mode de vie. Notre mode de vie contribue au changement climatique qui est indirectement responsable de très nombreux décès dans le monde. Il repose sur l’extraction massive de ressources minières exploitées dans des conditions parfois inhumaines. Le pétrole que nous achetons massivement à des pays tels que l’Arabie saoudite les rend si immensément riches et nécessaires qu’ils peuvent continuer impunément à nier les droits des femmes.

Pourquoi avons-nous accepté de changer radicalement notre mode de vie pour le coronavirus alors que nous ne sommes apparemment pas prêts à le faire pour des victimes encore bien plus nombreuses dans le monde ?

Les expert·e·s scientifiques

Comment expliquer que des expert·e·s scientifiques aient été tellement écouté·e·s par les gouvernements ? Alors que pour d’autres sujets comme le changement climatique, des analyses scientifiques existent, sont diffusées mais les décisions politiques peinent à suivre.

Quelle est la place des expert·e·s en matière de décision politique ? Comment distinguer ce qui relève de l’expertise scientifique et ce qui relève du débat démocratique ?

Les réseaux sociaux et la diffusion massive des informations nous permettent d’être informés rapidement, mais comment s’y retrouver dans le flux d’informations ? Comment faire le tri ? Quelle confiance attribue-t-on à tel propos plutôt qu’à tel autre ? Pourquoi ?

Comment distinguer un discours scientifique d’un autre type de discours ? Pourquoi tous les scientifiques ne sont-ils pas d’accord entre eux ?

Les dilemmes

En France, des médecins se sont retrouvés confrontés à un choix cruel. Plusieurs patients se trouvaient dans un état tel qu’ils ont besoin d’un respirateur artificiel, mais ils n’en avaient plus qu’un seul. Il fallait décider, vite, à qui on va le donner. Imaginons une situation similaire avec 6 personnes et seulement deux respirateurs. [On peut donner des noms aux personnes ou simplement des lettres d’identification pour aider la discussion.]

Une personne [A] se trouve en détresse respiratoire sévère, plus sévère que les autres. En fait, le risque qu’elle meure est très élevé, et lui donner un respirateur ne permet pas de dire qu’elle sera assurément sauvée. Elle a 60 ans.

Une autre personne [B], âgée de 90 ans ne se trouve pas dans une telle détresse respiratoire.

Une troisième personne [C], âgée de 19 ans, ne se trouve pas non plus dans une telle détresse respiratoire.

Une quatrième personne [D], âgée de 60 ans, se trouve dans le même état que les deux précédentes {B et C]. Elle est extrêmement riche et promet d’offrir un million d’euros au médecin s’il la choisit, elle.

Une cinquième personne [E], âgée de 35 ans, se trouve dans le même état que les trois précédentes [B, C et D]. Elle est mariée et a deux enfants de 2 et 4 ans.

La sixième personne [F], âgée de 29 ans, se trouve dans le même état que les quatre précédentes [B, C, D et E]. C’est une star, l’un des cinq DJ’s les plus connus au monde.

Discuter cette question fait apparaître ce à quoi on accorde de l’importance.

Interdépendance

Pendant quelques semaines, la Belgique a manqué de masque et de nombreuses personnes ont pris des risques. C’est le cas des infirmier·e·s à domicile, des aide-ménager·e·s, des policier·e·s, du personnel de grandes surfaces, de certains médecins, etc. En fait, ces masques sont normalement fabriqués en Chine, mais la Chine soit avait arrêté sa production pour lutter contre la propagation du virus, soit la conservait pour ses propres besoins. Est-il normal de se trouver comme ça dépendants du bon vouloir d’autres pays ? N’est-ce pas aussi le cas d’autres produits comme le pétrole que les pays exportateurs pourraient décider d’arrêter de nous livrer ? Comment En même temps, c’est grâce au fait qu’ils sont produit loin par une main-d’œuvre qu’on paie très peu qu’on peut avoir ici des vêtements bon marché. La mondialisation, c’est une sorte de grande distribution des productions dans le monde. Tel pays produit ceci, tel pays produit cela, la Belgique fabrique des bières et du chocolat. Et puis on s’échange. Sommes-nous prêts à revenir en arrière, à recommencer à produire certaines choses vitales ici pour ne plus dépendre du bon vouloir des autres  ? Mais cela coûtera beaucoup plus cher. Sommes-nous d’accord ?

Prendre soin des autres

On a imposé à tout le monde un confinement sévère et difficile pour diminuer la propagation d’un virus qui mettait surtout les personnes fragiles en péril. Cela signifiait que, pour les sauver, on a imposé aux jeunes des mesures strictes alors qu’ils et elles étaient beaucoup moins en danger.

Est-ce normal de demander un tel effort aux jeunes ? La loi de la sélection naturelle que l’on observe dans la nature a pour effet que les personnes les plus faibles ne survivent pas. Aurait-il été juste de laisser la nature faire ? Pourquoi ? Si vous pensez que oui, pourquoi ne l’a-t-on pas fait ? Si vous pensez que non, pourquoi la protection des plus faibles ne s’applique-t-elle pas dans d’autres situations telles que, par exemple, les personnes qui meurent de faim dans le monde ? Serait-il juste, par exemple, de demander aujourd’hui aux personnes fragiles qui ont survécu grâce à l’effort des jeunes qui se sont confinés de payer chacune 1000 euros à chaque jeune pour le ou la dédommager de sa peine  ?

Quel effet cela faisait-il de penser que, en restant confiné·e, vous preniez soin de votre voisin·e, de types de la rue que vous ne connaissez même pas ?

Un certain nombre de personnes, surtout au début, ne respectaient pas les consignes. Qu’en pensez-vous ? Les comprenez-vous ? Les excusez-vous ?

Certain·e·s disaient qu’ils et elles ne respectaient pas le confinement parce qu’ils n’en voyaient pas l’intérêt. Peut-on ne pas respecter la loi si on ne lui trouve pas d’intérêt ou d’utilité ?

Tester des vaccins en Afrique

À un moment, des articles ont paru pour dire que certains médecins ont évoqué la possibilité de tester des vaccins sur le continent africain. Ces personnes ont démenti avoir voulu dire cela, mais de nombreuses personnes ont dit, sur les réseaux sociaux, que ce serait une bonne idée si cela peut aboutir à des résultats dont le monde entier profitera. D’autres personnes ont estimé qu’il n’est pas acceptable que des êtres humains servent de cobayes sous prétexte qu’ils vivent dans des pays moins riches. Qu’en pensez-vous ?

Pourrait-on accepter qu’un pays très très pauvre comme Haïti ou la RDC vende à des entreprises pharmaceutiques le droit d’expérimenter des traitements ou des vaccins sur leur population ? Quels sont les arguments en faveur de cette idée ? Et les arguments en défaveur. Lesquels pèsent-ils le plus lourd ? Pourquoi ?

Coronavirus et libertés démocratiques

En Belgique, nous avons, pour des raisons de santé publique, accepté de renoncer à de très nombreux droits et  libertés : circuler dans l’espace public, vie culturelle (théâtre, concerts, cinémas, etc.), enseignement, droit de manifester, etc. On a pu le supporter parce que c’était temporaire et que la situation était exceptionnelle. Comment réagiriez-vous si les autorités en profitaient pour discrètement, ne pas vous rendre tous les droits une fois cette situation passée ? Si on devait interdire tous les concerts, par exemple. Ou de manifester dans la rue quand on n’est pas d’accord…

Jusqu’où sommes-nous prêts à abandonner nos libertés pour la santé publique ? La crise du coronavirus pourrait-elle motiver de renoncer à la démocratie au profit d’une dictature ?

Pour aller plus loin :

https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-la-perte-de-liberte-en-europe-preoccupe_3893041.html https://www.amnesty.be/infos/actualites/coronavirus-dossier

Crédit photo : Jezperklauzen sur iStock

 

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Fusillade dans une école au Texas

Fusillade dans une école au Texas

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Le conflit russo-ukrainien

Le conflit russo-ukrainien

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Le décès de George Floyd et ses conséquences

Le décès de Georges Floyd
et ses conséquences

Juillet 2020

Cette fiche est rédigée à l’attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet).

Les faits

Le 25 mai 2020, George Floyd est interpellé par quatre policiers alors qu’il se trouve dans sa voiture. Ils lui demandent d’en sortir et est menotté et plaqué au sol sur le ventre. Un policier appuie son genou sur son cou pendant près de neuf minutes pour l’immobiliser dans cette position. Selon les images filmées par des passant·e·s, George Floyd dit à plusieurs reprises qu’il ne peut plus respirer « I can’t breathe ». Les passant·e·s interviennent, attirent l’attention des policiers sur ce qui se passe, mais les policiers les tiennent à distance. Certain·e·s filment la scène. George Floyd décède, sans que les services de réanimation puissent le sauver. Les autopsies confirment la thèse du décès par étouffement.

 

Les images sont postées sur les réseaux sociaux et s’y propagent comme une traînée de poudre, provoquant effroi, émotion et indignation. Des manifestations et des émeutes contre le racisme et les violences policières se développent à Minneapolis, dans le reste du pays, puis dans le reste du monde.

 

Elles s’inscrivent dans la longue histoire des mouvements d’abolition de l’esclavage aux États-Unis, puis des mouvements anti-ségrégationnistes (Rosa Parks, Martin Luther King, Malcolm X) et, enfin, des mouvements qui, se basant sur l’héritage de personnes telles qu’Angela Davies et James Baldwin, réclament l’effectivité de l’égalité entre tou·te·s les citoyen·ne·s étasuniens. Le mouvement Black Lives Matter (Les vies noires comptent), né en 2013 aux États-Unis pour lutter contre le racisme systémique et les violences policières, est l’un d’eux. Il s’est considérablement étendu en 2020.

 

Les statistiques relatives aux conditions de vie (santé, alphabétisation, revenus), aux condamnations par la Justice montrent un différentiel de traitement entre les populations noires et blanches aux États-Unis. Voir à ce sujet l’article du Figaro « Ce que disent les statistiques ethniques des inégalités aux États-Unis »

 

Le décès de George Floyd dans les circonstances que l’on sait a remis sur le devant de la scène combien la société occidentale, dominante, reste marquée par une hiérarchisation de personnes dont on proclame par ailleurs qu’elles « naissent égales, en dignité et en droits ». En Belgique, ces discriminations restent très actuelles. Au delà des pratiques de profilage ethnique de la police, il reste plus difficile à une personne dont le nom et l’apparence évoquent des origines étrangères de trouver un emploi, d’obtenir un crédit ou d’accéder à un logement. Un débat — parfois virulent – a porté sur l’héritage colonial de la Belgique. Il a été question de déboulonner des statues, de changer des noms de rues.

 

PENSER LES FAITS : QUELQUES PISTES

 

Pourquoi certain·e·s interagissent différemment avec les autres en fonction de la couleur de leur peau ?

 

Le cas de George Floyd est une illustration d’un phénomène plus large qui montre que, dans de nombreuses situations, la police américaine traite différemment une personne à laquelle elle a affaire selon que sa peau soit blanche ou noire. On peut lancer la discussion en posant cette question : pourquoi certaines personnes (dans ce cas-ci, des policiers, mais on peut élargir) font-elles une différence entre les gens en fonction de la couleur de leur peau ? Il ne s’agit pas, pour chaque élève, de communiquer sa posture personnelle, de dire s’il fait, lui ou elle, une différence, mais de dresser une liste de raisons pour lesquelles les gens – en général – en feraient une. Une fois la liste dressée, on peut en discuter les éléments.

 

GROUPE SANGUIN ET SIGNE DU ZODIAQUE

 

La couleur de la peau semble être un élément objectif intrinsèque à la personne, une partie de son identité. Pour discuter les spécificités de cet attribut, on peut utiliser le groupe sanguin et le signe du zodiaque. Pourquoi faire un tel cas de la couleur de la peau et pas du signe du zodiaque ou du groupe sanguin ? Que dirions-nous si des policiers nous demandaient notre groupe sanguin et, en fonction de la réponse, décidaient de nous traiter avec amabilité ou agressivité ? Cette situation « absurde » permet, d’adresser la question de la spécificité de la couleur de la peau. Pourquoi cet élément distinctif-là ? Pourquoi pas la couleur des yeux, des cheveux, la taille, la morphologie ? Dans la même veine, on peut se référer à l’expérience de Jane Elliott qui, pour faire comprendre le caractère arbitraire et injuste de la discrimination raciale, a traité différemment ses élèves porteurs·ses d’yeux bleus et ses élèves porteurs·ses d’yeux marron.

 

Naît-on raciste ou le devient-on ?

 

Si on naissait raciste, si c’était inné, qu’en serait-il de notre liberté ? Ne serions-nous pas, dans ce cas, les esclaves d’opinions qui s’imposent à nous ? En serait- on, du coup, responsable ? Tout est-il déterminé d’avance ?
Si on devient raciste, comment le devient-on ?

 

LE RENFORCEMENT DES PRÉJUGÉS

 

Le phénomène est bien documenté en psychologie. Les êtres humains ont une tendance naturelle et inconsciente à valoriser les observations qui confortent leurs croyances et à négliger celles qui les remettent en cause. Par exemple, certain·e·s pensent que les conductrices sont moins habiles, au volant, que leurs homologues masculins. S’ils ou elles observent un homme peinant à faire son créneau, ils ne le prendront pas en compte (parfois, ils ou elles ne le verront tout simplement pas !) tandis que s’ils ou elles sont confronté·e·s à une femme qui éprouve des difficultés dans sa manœuvre, ils ou elles le noteront et renforceront leur conviction initiale.

 

Le renforcement des préjugés est fréquent, s’agissant de la couleur de peau. Une personne raciste attribuera un acte négatif commis par une personne noire à la couleur de sa peau, mais l’attribuera à autre chose s’il est commis par une personne blanche. Ce faisant, elle se conforte dans l’idée que les personnes noires diffèrent des personnes blanches.

 

Les manifestant·e·s

 

Le décès de George Floyd a révélé que la société américaine reste marquée par la discrimination liée à la couleur de la peau. Des personnes sont descendues dans les rues pour manifester, pour réclamer que les autorités prennent des mesures concrètes pour lutter contre cette injustice.

 

[Le risque existe que la discussion s’enlise sur l’efficacité de ces manifestations (là-bas et ici), sur la pertinence du recours à ce moyen pour changer les choses. Une telle discussion relève du champ « technique », s’éloigne de celui des valeurs et des principes sur lesquels repose et/ou devrait reposer notre société.]

 

Parmi ces manifestant·e·s, on compte beaucoup de personnes noires. On compte aussi des personnes blanches qui n’ont, a priori, pas d’intérêt personnel à une amélioration des conditions de vie des personnes noires. Que pensez-vous de ces manifestant·e·s qui n’ont rien à gagner pour eux-mêmes et elles-mêmes ? Comment peut-on expliquer que quelqu’un·e prenne la peine de demander quelque chose qui ne le ou la concerne pas directement ? Pourriez-vous, vous, vous mobiliser pour une telle cause ?

 

Imaginons que la direction de l’école organise, pendant une récréation, un rassemblement de tous les élèves pour faire huit minutes de silence à la mémoire de George Floyd. La participation des élèves à l’événement est laissée à l’appréciation de chacun d’eux, de chacune d’elles. Pourriez-vous envisager d’y prendre part alors que vous vivez en Belgique ? Dans quelle mesure vous sentez-vous concerné·e·s par le sort d’autres personnes que vous ne rencontrerez probablement jamais ?

 

[On pourrait proposer un débat mouvant, les élèves se situant d’un côté de la classe si ils ou elles adhèrent à l’idée de participer à une telle manifestation et se situant à l’autre extrémité si ils et elles y sont farouchement opposé·e·s. On peut aussi se positionner de façon intermédiaire, plus ou moins proche des extrémités. Le risque est alors de créer, au sein de la classe, des effets d’adhésion à la norme et que l’on choisisse sa position en fonction de celle des autres élèves.]

 

Racisme et sexisme

 

Les femmes sont victimes de discriminations ; les personnes racisées aussi. Peut-on dresser des parallèles entre ces deux phénomènes ?

 

Les Blancs dans un cas, les hommes dans l’autre : les « dominant·e·s » sont-ils·elles vraiment les plus fort·e·s ? N’est-ce pas un signe de faiblesse que de vouloir dominer l’autre ? Quand les discriminations se cumulent, on parle d’intersectionnalité. Par exemple le fait d’être femme et noire multiplie les risques de problèmes.La discrimination est pourtant prohibée, notamment par la Convention européenne des droits de l’homme du 4 novembre 1950 (article 14). Pourquoi existe-t-elle encore ? Comment se fait-il que de tels comportements soient à ce point ancrés qu’il n’est pas possible de les éradiquer aisément ?

 

Le rôle de la police et l’usage de la violence

 

La police est parfois surnommée « gardiens de la paix » et parfois, aussi « forces de l’ordre ». Ces deux expressions ne sont pas équivalentes.

 

La police est détentrice de la violence légitime. Elle a le droit d’utiliser la contrainte et la force dans le cadre de ses missions. Certain·e·s disent qu’un tel pouvoir s’accompagne d’une responsabilité équivalente. Cela signifie notamment que la police devrait, selon ces avis, faire d’autant plus attention à ce qu’elle fait, à ne pas dépasser les limites. Qu’en pensez-vous ? Quelles sont les limites qu’il est juste de fixer aux forces de police, au delà desquelles elles n’ont pas le droit d’opérer ?

 

Quelle devrait être la première mission de la police ?

 

Si vous étiez chef·fe·s de la police, quelles seraient les missions que vous donneriez en priorité aux policiers ? [L’échelle de ces priorités fait apparaître celle des valeurs des élèves.]

 

Questions de limites…

 

George Floyd a commis des délits dans sa vie. Son dossier judiciaire atteste qu’il a eu plusieurs démêlés avec la justice, qu’il a été accusé de trafic de drogue en 1997. Il aurait aussi commis, en 2007, un vol à main armée qui a abouti à une lourde condamnation et à une peine de cinq ans de prison.

 

Cette information rend-elle son décès moins grave ? Cette information offre-t-elle une excuse aux policiers ?
Avons-nous tou·te·s la même valeur ou la vie de personnes qui ont été condamnées par la justice a-t-elle moins de valeur que celles des personnes qui ont toujours respecté la loi ?

 

À partir de quelle niveau de condamnation commencerait-on à « perdre de la valeur » ?

 

En outre, il n’existe pas seulement les « Blancs » et les « Noirs ». Il existe entre ces extrêmes tout un nuancier de couleurs de peau. Où met-on la barrière entre les personnes pour lesquelles la violence policière serait légitime et celles pour lesquelles elle ne le serait pas. Peut-on mettre son doigt sur la frontière ? Où, précisément, met-on la limite entre les gens d’une sorte, qui auraient certains droits, et les gens d’une autre sorte, qui ne les auraient pas ?

Pourquoi le décès de George Floyd a-t-il si fortement ébranlé le monde ?

 

L’affaire George Floyd n’est malheureusement pas le premier cas de violence policière entraînant un décès. Pourtant l’ampleur de l’indignation est énorme ailleurs dans le monde. Pourquoi ? Cette colère s’exprime-t-elle surtout là où des situations similaires de discrimination sont vécues et mettent en lumière les divisions de la société ? La situation est-elle la même en Belgique ? Pourquoi la question du déboulonnage de statues est-elle posée à Bristol, Paris ou Bruxelles ? Qu’a à voir Léopold II avec George Floyd ? Pourquoi la question du nom donné à certaines rues, des traces de la colonisation dans l’espace public se pose-t-elle à Bruxelles, Namur ou Liège alors que les faits se sont déroulés à Minneapolis ? Quels seront les effets à plus long terme ? Qu’espérer comme avancées, comme progrès dans la société ? À quelles conditions un changement durable s’inscrit-il dans la société ?

 

En Belgique aussi…

 

Des exactions épouvantables ont été commises alors que le Congo était gouverné par les Belges. La Belgique devrait-elle présenter ses excuses ? Pourquoi ? Sommes-nous, aujourd’hui, responsables de ce qu’on fait les Belges de l’époque ? Pourquoi les descendant·e·s des victimes estiment-elles qu’il est important que de telles excuses leur soient présentées ?

 

L’image d’un homme qui meurt

 

Des centaines de millions de personnes ont vu l’image de George Floyd agonisant.
Certain·e·s pensent que l’agonie d’une personne est l’un des événements les plus personnels, les plus intimes de sa vie. Selon elles et eux, il ne viendrait à personne l’idée de filmer, avec son smartphone, les dernières minutes de la vie de leur grand oncle.

 

Ici, dans le cas de George Floyd, les personnes qui filmaient n’avaient pas conscience que la vie d’un homme s’évaporait. Mais, ensuite, les images ont été diffusées en connaissance de cause. Il est des personnes pour défendre le point de vue selon lequel c’est au prix de la diffusion de telles images, choquantes, que l’on pourra obtenir des résultats, faire changer les choses.
Qu’en pensez-vous ?

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