Augmentation du coût de l’énergie

Septembre 2022

Cette fiche est rédigée à l’attention des tou·te·s les enseignant·e·s et éducateur·rice·s de secondaire. Elle propose différentes pistes de réflexion parmi lesquelles choisir afin de mener une discussion de 15 minutes (ou plus si le contexte le permet).

Les faits

Le prix de l’énergie dans l’Union européenne a atteint des niveaux records en 2022. Cette hausse a commencé en 2021 au lendemain de la pandémie de COVID-19. En effet, lors de la relance économique post-COVID-19, la demande en énergie a fortement augmenté. Les gens ont recommencé à se déplacer, travailler, voyager, consommer, sortir, etc. et tout cela a généré une demande énergétique accrue. Or, l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) n’a pas pour autant augmenté sa production de pétrole. Les prix ont alors connu une première envolée car l’offre était inférieure à la demande.

Guerre en Ukraine et sanction russe
Les prix ont connu une deuxième envolée suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. La Russie a en effet pris la décision unilatérale de suspendre les livraisons de gaz à certains États membres de l’UE, qui soutenaient l’Ukraine. Ceci a eu pour conséquence de faire grimper le prix du gaz, et d’entraîner un nouveau record des prix de l’électricité dans l’UE. Il faut avoir que la Russie fournissait 30 % en moyenne du gaz à l’Europe (et 50 % à l’Allemagne, qui est le moteur de l’Europe). Il existe donc de forts liens d’interdépendance énergétique entre ces pays. Aujourd’hui, les membres de l’UE cherchent de nouvelles sources d’approvisionnement, qui pourraient provenir des pays nordiques, et notamment de la Norvège1.

Concrètement, entre mai 2021 et mai 2022, le prix du gaz naturel a augmenté en moyenne de 98,42 % en Belgique. La facture de gaz moyenne annuelle des Belges est ainsi passée de 1215,28 € à 2411,36 €. Les États-Unis, quant à eux, ne sont pas inquiétés par cette hausse, car ils produisent eux-mêmes leur pétrole, et fractionnent désormais le gaz de schiste pour ne plus dépendre de la Russie.

Une inflation galopante
Une autre conséquence de l’augmentation du prix de l’énergie est l’inflation. En effet, presque la totalité de ce que nous consommons est produit à base de gaz ou de pétrole. Le coût de la production et du transport de ces produits a également augmenté, ce qui se répercute sur le prix de vente. Le taux d’inflation annuel devrait s’élever à 9,4 % en 2022, contre 2,44 % en 2021 et 0,74 % en 2020.

Or, lorsque l’inflation augmente, les taux d’intérêt grimpent aussi. En effet, lorsque l’inflation est élevée, les prêteurs savent que lorsqu’ils seront remboursés, l’argent qu’ils ont prêté aura perdu de la valeur. Ils exigent alors un taux d’intérêt plus élevé pour compenser cet écart.

Une impact direct sur les citoyen·nes
Cette augmentation des prix de l’énergie n’est pas sans conséquence sur les ménages, mais aussi les entreprises et les écoles. Nous devrons cet hiver réinventer notre façon de nous chauffer, que ce soit en diminuant le thermostat (saviez-vous qu’un degré un moins, c’était 5 % de moins sur la facture ?), en superposant les pulls ou en limitant la durée de nos douches chaudes. Peut-être l’occasion de réfléchir à notre consommation d’énergie ?

Virginie Stassen (09/06/2022)

Penser les faits : quelques pistes

 

Pas possible de vivre autrement ?

 

Avec l’augmentation du prix de l’énergie on voit comment nous sommes bousculé·es dans nos modes de vie. Si nous y sommes contraint·es par des dispositions légales nous pouvons nous adapter, mais ressentons très vite que la situation ne nous convient pas, aspirons de « revenir à la normale ». Cette « normale » semble incarner notre alpha et notre oméga. Souffrons-nous d’addiction à ce mode de vie « normal » ? Sommes-nous drogué·es à notre mode de vie au point que tout ce qui nous en écarte serait devenu insupportable ? Est-ce que le changement peut faire peur ? peut être encouragé ? Est-il « normal » d’avoir besoin d’autant d’énergie pour vivre ? Sommes-nous réellement libres ou conditionné·es à faire comme on a toujours fait / à être comme on a toujours été ?

 

Qu’est-ce qu’une mesure juste ?

 

Si l’État diminue les accises sur l’énergie, il paie lui-même x centimes par litre de carburant pour diminuer d’autant la facture du consommateur ou de la consommatrice. Cependant, serait-il juste, pour l’État :
– de diminuer le prix de l’énergie de la même façon pour la personne qui l’utilise pour chauffer sa piscine que pour celle qui ne l’utilise que pour chauffer son appartement ?
– d’octroyer une aide du même montant aux riches et aux pauvres ? de traiter de la même façon la personne qui a fait le choix de conduire un gros 4×4 qui consomme énormément, voire d’utiliser un jet privé, et celle qui s’est contentée d’une petite voiture ?
– d’octroyer une aide équivalente à la personne qui achète de l’essence pour conduire ses enfants à l’école éloignée, ou que son métier contraint à rouler beaucoup et à celle qui en profitera pour partir en vacances ? Y a-t-il des utilisations de l’énergie plus « nobles » ou plus « justifiables » que d’autres ?
Quelle différence fait-on entre égalité, équité et solidarité ?
Faut-il privilégier une mesure « juste » ou une mesure « simple » (à comprendre et à appliquer) ?

 

Milieu rural et milieu urbain

 

La Région bruxelloise est très richement pourvue en transports en commun financés par la collectivité. Ce n’est pas le cas dans les villages de régions plus rurales. De nombreux·ses habitant·es n’ont pas le choix et doivent utiliser un véhicule automobile pour se déplacer.
Est-il équitable que certain·es, pour la raison qu’ils et elles sont plus nombreux·ses, bénéficient d’une offre plus grande en modes de déplacement alternatifs ? Qu’en pensez-vous ?

 

Genre et coût de l’énergie

 

Les personnes qui éprouvent le plus de difficultés à faire face à l’augmentation du prix de l’énergie sont les familles les plus pauvres. Parmi elles, on retrouve notamment les familles monoparentales avec un grand nombre de femmes chef de ménage. Les femmes ont, en moyenne, plus la garde des enfants que les hommes. Elles ont aussi souvent moins de revenus.
Globalement, les femmes sont plus touchées que les hommes par ces hausses de prix. Trouvez-vous qu’elles devraient faire l’objet de davantage d’aide ?

 

Changement climatique et déconsommation

 

Cela fait quelques années que se sont intensifiées et qu’ont été médiatisées les manifestations pour le climat qui ont relevé notamment le problème des énergies. Or, il semble que ce n’est que maintenant, alors que le prix du carburant augmente, que l’on voit apparaître, de façon plus significative, des stratégies de réduction de sa consommation.

L’argent est-il un moteur plus puissant que la conscience pour opérer un changement de comportement ? Certain·es consommateur·rices affirment vouloir consommer « mieux » plutôt que « plus ». Selon vous, y a-t-il d’autres raisons qui peuvent motiver cette « déconsommation » ?

Certaines personnes choisissent de faire des économies d’énergie dans l’intérêt général (ex : diminuer le thermostat pour consommer moins d’énergie). D’autres préfèrent chauffer correctement la chambre d’un bébé par exemple. Comprenez-vous ce type de raisonnement ? Y a-t-il des bonnes et des mauvaises raisons ? Que penser du fait que certain·es font des efforts et d’autres pas, que celles et ceux qui n’en font pas profitent des efforts des autres ?

Les entreprises doivent-elles prendre leur part dans l’effort collectif ? Certaines mesures y sont prises pour faire des économies, mais cela leur permet surtout d’augmenter leurs profits ou d’atténuer leur pertes. Doivent-elles le faire aussi en perdant de l’argent (par exemple, un centre commercial devrait-il installer plus de bancs dans ses allées pour permettre à des personnes sans domicile fixe de s’y trouver au chaud cet hiver, au risque de perdre une part de sa clientèle ?) ?

D’autres pensent que c’est aux pouvoirs publics d’organiser une réponse collective organisée. Quelle place l’État occupe-t-il dans nos vies? Est-ce toujours à l’État de trouver des solutions à tous les problèmes ? Cela risque-t-il de déresponsabiliser les citoyen·nes ? Qu’en pensez-vous ? Comment définiriez-vous le type de solidarité entre individus qu’incarne l’État ?

 

Les surprofits sont-ils indécents ?

 

Si je produis un bien quelconque à 15 € l’unité, le commercialise à 20 € l’unité, je réalise une profit de 5 € par unité. Si, un mois plus tard, le prix de ce bien se trouve soudain augmenté et passe à 100 €, je ferai un bénéfice de 85 € par unité. Ainsi, les entreprises productrices d’énergie (d’électricité, par exemple) ont-elles augmenté considérablement leur profit. Elles réalisent des gains exceptionnels.

D’aucun·es jugent ces gains « indécents ». Qu’est-ce qui est, pour vous, « indécent » ? Considérez-vous que ces profits exceptionnels sont indécents ? Pourquoi ? Est-ce plus ou moins indécent que les profits gigantesques engrangés par certaines grosses entreprises ou multinationales ?

Ces profits ne sont pas perdus. Ils seront distribués à l’État sous forme de taxation, mais aussi (et surtout) aux actionnaires sous forme de dividendes et d’augmentation de la valeur de leurs actions. En quoi serait-ce problématique ou indécent que ces personnes recueillent le fruit de leur investissement ?

Sans procéder à des généralisations abusives, certaines entreprises « profitent » comme c’est le cas ici, de la hausse soudaine du prix du produit qu’elles commercialisent. D’autres entreprises réalisent des profits exceptionnels en exploitant leurs travailleurs (conditions de travail désastreuses pour des salaires de misère) et/ou en ne respectant pas les normes environnementales (des pétroliers qui vident leurs cales dans la mer pour éviter les frais de nettoyage de ces cales). Peut-on comparer ces façons de réaliser des profits ?

1. https://www.lemonde.fr/international/article/2022/03/21/guerre-en-ukraine-la-production-de-gaz-naturel-norvegien-au-maximum-de-sa-capacite_6118422_3210.html

 

Pour aller plus loin :

CAP Energies

 

 

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